Burn out.

En 2016, l’Académie nationale de médecine estime à 100 000 le nombre de personnes victimes d’épuisement professionnel.

En juillet 2019, assise un matin à mon poste de travail, je ne sais plus envoyer un email. Je regarde mon écran, sans comprendre, sans pouvoir agir, incapable d’accomplir ma to do list précisément préparée. Bug du système. Vide, néant. Mes collègues alarmés m’envoient voir un médecin généraliste qui, après m’avoir diagnostiqué un burn out, conclut par ces mots : « le burn out, c’est un véritable problème de santé publique ; on ne sait plus quoi faire, ici, à Paris, j’en vois trois par jour ».

En 2021, une enseignante m’informe que la moitié d’une classe d’étudiants en anthropologie de 2006 a fait un burn out. A la radio, j’entends que près de 15% de la population active serait en risque élevé de burn out. Autour de moi, quand je commence à parler de mon burn out, j’ouvre la boîte de Pandore : « moi aussi … » « et moi … » « je connais quelqu’un qui… ».

Un mémoire, deux entrées

Mon premier mémoire de recherche de 2020/2021 a porté sur le corps en burn out. D’abord, pour évacuer le soupçon de la maladie psychosomatique, pas vraiment crédible. Mais aussi pour comprendre ce qui se passe physiquement dans le corps qui tombe malade, qui subit un traumatisme, une scission à l’intérieur de lui, fait l’expérience du doute corporel, est appelé à retrouver le sentiment de soi.

Le deuxième mémoire, celui que je soutiens cette année 2022, sur le sujet en burn out. Du corps au sujet, il n’y a qu’un pas. Mais le terme “sujet” permet d’intégrer des expériences de vécu parfois restreintes par la seule entrée du corps. Le sujet en burn out fait l’expérience d’une pathologie de rythme. C’est la thèse de ce mémoire. Le burn out vient affecter les catégories d’espace, de temps et de mouvement qui composent la notion de rythme.

Des entretiens et des rencontres

Je voulais fonder ce travail sur l’histoire, la narration de ceux qui ont vécu un burn out. Car les vécus sont multiples, les trajectoires de vie aussi et la parole des sujets doit être entendue.

Alors merci à ceux qui ont prêté leur voix à ce travail. Merci à ceux que j’ai rencontrés, ceux qui ont répondu à mon questionnaire, qui m’ont partagé leur histoire et leur douleur.

Anonymes qui se reconnaîtront, ce mémoire n’aurait pas pu voir le jour sans vous et pour cela, je vous suis infiniment reconnaissante.

Et après ?

Ce travail est parti d’un projet un peu fou de reprendre un master de Philosophie, d’abord pour renouer avec ces études que j’avais tant aimées et peut-être un peu pour réfléchir à ma propre pathologie ? Ce master de Culture et Santé m’a amenée à réfléchir sur le burn out, sur mon burn out. Même si la visée n’était pas thérapeutique, elle a nécessairement eu des effets de cet ordre.

Mais à présent, il est temps pour moi de lâcher ce travail, de dénouer cette intimité avec le burn out et de repartir sur une autre phase, un autre rythme. Même si le burn out ne quitte jamais vraiment celui qui l’a vécu, sous forme de piqûre de rappel, une maladie chronique ou une addiction peut-être, j’ai envie de croire à la possibilité de s’en prémunir. Et m’éloigner de ce sujet de recherche me semble être une piste à tester.

Merci encore et belle lecture !

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